Du lundi 21 septembre 2009 au lundi 20 septembre 2010,
Guillaume Bardet a dessiné à la main et modélisé numériquement
un projet par jour, pendant quatre saisons.
Du mois d'octobre 2010 au mois de novembre 2011,
il a accompagné la réalisation de ses 365 objets par quatorze céramistes,
.
Du lundi 12 septembre au vendredi 25 novembre 2011,
Pierre-Olivier Deschamps a photographié en lumière naturelle les 365 pièces
dans la faïencerie de Poët-Laval,
à la Manufacture de Sèvres et à l'usine Ceralep de Saint-Valier.
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From Monday 21 September 2009 to Monday 20 September 2010,
Guillaume Bardet drew and digitally modelled
one abject per day, over fourseasons.
From October 2010 to November 2011, he supervised the production
of his 365 abjects by fourteen ceramists.
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From Monday 12 Septemberto Friday 25 November 2011,
Pierre-Olivier Deschamps photographed the 365 works
in natural light at thePoët-Laval pottery, the Manufacture de Sèvres
and the CERALEP factory in the Saint-Valier basin.
Le Mobilier Immobile
Le Mobilier Immobile
La Cène
Guillaume Bardet
Guillaume Bardet
Guillaume Bardet
Guillaume Bardet
Paradoxe d'un designer
Il y a dans la cour de ma maison de famille, une plaque de pierre, mal taillée, posée en équilibre sur une souche, qui fait office de table basse. Je l'ai toujours connue. L'hiver, presque invisible, elle trône pourtant, seule au milieu du jardin. L'été, on y installe des bancs et la vie de la maison toute entière tourne autour, à l'ombre du platane. Cette installation a vu des générations disparaître, d'autres apparaître : elle est imperturbable au temps, au vent, à la pluie, à la glace.
De meuble, elle est devenue immeuble. D'objet, elle est devenue architecture.Elle est devenue partie intégrante de la maison.
Elle est devenue la maison.
Pourtant elle n'est pas pratique : trop petite, branlante.Pas bien belle. Mais elle a survécu aux caprices du temps.
Sans doute parce que sa principale qualité est d'être immobile, presque invisible et parce que non dessinée, elle est vierge de tout signe d'obsolescence. Elle est entrée dans notre musée familial : inamovible, indémodable.
Simplement peut-être parce qu'en pierre, elle est indestructible et très difficile à transporter. Sûrement aussi parce que la pierre taillée porte l'empreinte d'une humanité. Le petit banc en pierre du XVIe siècle est le parfum d'une époque. La trace d'une balle dans la pierre, cicatrice d'une guerre. Une pierre noircie, mémoire d'un incendie.
Travailler la pierre
Vouloir travailler la pierre, c'est vouloir prendre une respiration par rapport à la quotidienneté de ma création : ce matériau inusable interroge mes processus de travail, mes réflexes de concepteur.
Je suis soudain contraint de me dégager d'une vision du présent trop présente.
A la création d'un équilibre magique
l'Italie a la chance d'avoir une variété considérable de pierres.Il y a l'inévitable travertin, " la " pierre romaine, le marbre de Carrare… Des pierres que je veux découvrir, chacune avec son histoire, ses connotations, son poids symbolique, pour savoir comment les utiliser avecpertinence.
Une confrontation physique
Une pertinence que je veux travailler à la fois du point de vue symbolique, mais aussi physique, immédiat, dans le rapport que la pierre entretient avec l'environnement puisque c'est vers le mobilier extérieur que je veux diriger la recherche. C'est là, il me semble, que ce matériau prend tout son sens parce qu'il vit avec letemps.
Fort peu exploité par le design contemporain, le meuble de pierre " implanté " à l'extérieur, immobile, bouscule les codes établis du design mobilier et situe la recherche que je souhaite mener au croisement de l'architecture, de la sculpture et du design. L'art de vivre à l'extérieur en Italie constitue un contexte favorable à cette articulation entre l'espace extérieur et l'objet mobilier. Ma recherche sera proche de la confrontation physique. Un combat qui ne peut s'exécuter que grandeur nature.
Une recherche émotionnelle sur le sens, sur les sens au-delà de l'objet, de la fonction, de l'équilibre et du déséquilibre. Une recherche d'un jeu sur l'immobilité, à l'image de ces roches branlantes, devant lesquelles le promeneur est saisi par la force d'une pierre figée, puis, en la touchant, constate que cette pierre bouge, qu'elle est fragile et redoute qu'elle bascule, et qui finalement se rend compte qu'imperturbable, elle revient à sa place.
Guillaume Bardet, Paris Avril 2002
sujet présenté pour l'admission à la Villa Médicis, Académie de France à Rome